Français concertants, échangeant

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Une réforme fiscale à point nommé. R. Montgranier

UNE REFORME FISCALE A POINT NOMME. (René Montgranier ).

AVANT - PROPOS

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On ne saurait trouver la cause d'une crise non conjoncturelle d'un Etat sans examiner dans les faits son organisation et sa situation fiscales. Rares sont les historiens qui attirent l'attention sur le fait capital que les groupes sociaux et les empires ne survivent pas à une fiscalité inadaptée, c'est à dire déficiente, car "le système fiscal est la charnière entre l'infrastructure économique et la structure politique" 1

 

Sujet aride certes, mais que valent les jugements de ceux qui l'ignorent ?

 

"L'évolution économique du monde ne peut se comprendre si l'on fait abstraction du milieu fiscal dans lequel toutes les activités humaines sont plongées" 2.L'impôt n'est pas neutre et son influence sur la vie économique est directe.

 

Excessif et mal conçu il est la cause première de la décadence des groupes sociaux et des empires parce qu'il ne permet plus ni leur entretien ni leur défense. L'Egypte ancienne, l'empire romain, Byzance, les royautés européennes, l'empire ottoman nous l'ont démontré par leur fin.

Notre tragique destin sera de vivre celui de la France si nous ne prenons pas d'urgence les décisions nécessaires. " La désintégration de l'Etat a toujours accompagné la désintégration de l'impôt " 3 .1.2.3

Le développement de l'ancien régime européen a été entravé, on le sait, par les multiples obstacles au trafic, péages accumulés, octrois : ces douanes intérieures et dîme qui décourageaient, par l'arbitraire, le travail et l'investissement.

 

Or nos services fiscaux actuels conservent beaucoup plus de traits du passé que nos spécialistes ne le disent ou ne le pensent. Nos impôts indirects reproduisent les caractères de la Ferme générale. L'Etat a abandonné les vieilles contributions directes mais elles survivent dans les collectivités locales. L'impôt sur le revenu garde les caractéristiques de l'Income tax, créée au Royaume-Uni, pendant les guerres de la Révolution et de l'Empire. L'administration napoléonienne n'a fait que systématiser et synthétiser les conceptions élaborées au cours des siècles précédents. Or elles sont toujours nôtres !

 

Nous n'y avons ajouté que des complications et des compilations de plus en plus nombreuses et, si nous sommes passés du pillage primitif à la réquisition puis à la corvée, finalement à l'impôt, nous n'avons supprimé ni la contrainte personnelle ni les difficultés de l'assiette et du recouvrement. L'impôt sur les produits, les salaires, sur les revenus et la propriété, c'est à dire sur la nature des échanges et des biens et non sur leur valeur monétaire, continue à multiplier le byzantinisme des formulations réglementaires. Nous avons érigé au fil des ans une montagne de papiers faite de milliers de lois, de règlements et de jurisprudence, que personne n'a plus la force d'aborder pour façonner, en dépit de la vie, une économie adaptée aux seuls besoins du fisc. Cette conception, au rebours de l'évolution des faits aboutit, comme hier, à des échecs de plus en plus lourds.

 

A travers ces échecs on constate que les barrières auxquelles se heurtent aujourd'hui tous nos entrepreneurs, petits ou grands, sont le fait d'une part, de l'ignorance que l'impôt doit servir avant tout à maintenir ou à rétablir l'équilibre de l'économie, et d'autre part que les problèmes techniques posés par son assiette et son recouvrement doivent s'adapter aux réalités mouvantes.

 

Il est une vérité d'expérience : quand les choses changent la méthode et les outils d'intervention sur elles doivent changer. Faute de quoi, elles échappent à la préhension.

Nous vivons cette période d'impuissance dont la prolongation fait courir les plus grands risques au pays. Nos conceptions et notre réglementation fiscales n'ont plus de prise sur la réalité parce que l'on continue à utiliser des pratiques diamétralement opposées à l'évolution des faits économiques. Sous des dénominations diverses on recrée un second impôt sur le revenu après avoir par pure démagogie supprimé le premier pour la moitié des contribuables. De même on continue d'augmenter les prélèvements obligatoires sur les entreprises, augmentant de la sorte leurs prix de vente et que se multiplient les petites taxes prétendument indolores dans la tradition de Colbert pour éviter les réactions violentes du public. Mais on finit toujours par dépasser la limite et le résultat est là : la chute de l'économie et ses conséquences sociales ont le caractère de l'avalanche qui va s'élargissant et s'accélérant. Les déclarations lénifiantes et les invocations contraires n'y changent rien.

 

" En 1988, le déficit budgétaire était deux à trois fois moins élevé qu'aujourd'hui et la dette de l'Etat était trois fois moins lourde" 4. Ce constat établi on n'en a pas moins poursuivi dans la mauvaise direction, aveuglément, sans effort d'imagination. Jusqu'ici aucun de nos experts n'a observé que l'augmentation des impôts a eu pour conséquence directe l'augmentation du chômage. Depuis 1960 les courbes sont parallèles! Personne, non plus, ne semble avoir compris cette vérité de La Palisse que la seule façon de créer des emplois est de relancer l'économie et non pas de gonfler artificiellement le personnel des entreprises ou de diminuer le temps de travail qui, depuis 1960 a chuté de 30% alors que dans le même temps le chômage s'est multiplié par plus de 30 fois.

 

Il n'y a pas d'alternative.

Le problème à résoudre est de savoir comment assurer la relance économique sans sacrifier le social.

 

On ne l'obtiendra pas avec des rapetassages et des demi-mesures. La décision à prendre d'urgence est de supprimer tous les actuels prélèvements obligatoires qui étranglent toutes nos entreprises — impôts, taxes et charges diverses — et de pratiquer ces prélèvements sur une autre assiette, quitte à changer radicalement de méthode et de moyens.

Or, il est une solution globale qui peut-être mise en place rapidement et qui résoudrait en outre nombre de difficultés graves auxquelles notre pays est également confronté.

 

Aujourd'hui 95% des règlements économiques et sociaux — à l'exception des trafics illégaux — s'opèrent à travers les banques, les CCP et les organismes financiers agréés. Ces mouvements de fonds atteignent chaque année des milliers de milliards de francs. Une simple taxe automatique de 1% sur les crédits et les débits des comptes des particuliers et des entreprises et virés à court terme au Trésor Public, couvrirait progressivement en très peu d'années les dépenses des budgets publics qui baisseraient d'un pourcentage considérable.

 

Cette taxe moderne, la Taxe Automatique sur les Mouvements de Fonds ( T.A.M.F ), relève uniquement de la technique, ne présume aucune position d'ordre politique et ne présente aucune difficulté d'application. L'équipement informatique de pointe de nos organismes financiers agréés et le niveau de culture pratique de notre population sont des avantages importants qu'il faut utiliser — non seulement pour réduire notre actuel handicap de compétitivité vis à vis de nos concurrents étrangers — mais pour mettre au point une nouvelle forme de société, à la fois plus simple et plus juste, rationnelle et plus libérale, plus économique et plus productive.

 

L'histoire nous apprend que, sans aucune exception, toutes les cités, toutes les nations et tous les empires du monde se sont effondrés sous l'insidieuse  ou brutale invasion de populations étrangères et du fait de l'inadaptation de leur fiscalité à leur développement économique et social...

NOUS Y SOMMES ! 

 



1.2.3 Gabriel Ardant . Histoire de l'impôt, pages 12 et suivantes.

4 Alain Juppé : Le Point 27 avril 1996



09/03/2012
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